Isabelle Bourvellec fait désormais vivre six personnes.
Isabelle et Gurvan Bourvellec ont ouvert le Pie noir café sur leur exploitation, près du château de Suscinio à Sarzeau. Cette diversification couronne vingt ans de travail et prouve qu’on peut produire du fromage en Bretagne.
En arrivant, à Sarzeau, sans le sou, il y a vingt ans, ils n’auraient jamais imaginé se retrouver à la tête d’un resto.Et pourtant, le 1er avril dernier, Gurvan et Isabelle Bourvellec ont ouvert le Pie noir café, sur le site même de leur ferme fromagère, à deux pas du château de Suscinio.
Sur près de 300 m2, le couple propose, en plus de sa nouvelle boutique, des dégustations de sa fameuse tome de Rhuys déclinée sur des tartines, des planches de charcuterie mais aussi des petits plats à base de porcs blancs élevés sur place.
Un projet de famille
« C’est de la cuisine simple mais saine. Notre objectif est de proposer uniquement des produits locaux qui ont du goût », martèlent les agriculteurs. Ils sont désormais épaulés par leur fils Dozhwal, 22 ans et peut-être bientôt par leur fille Ozvan, 19 ans, qui effectue des études de pâtisserie. « C’est un projet de famille », confie Gurvan.La ferme est une étape incontournable pour les touristes (et un passage obligé pour les locaux). L’été, il n’est pas rare de voir des dizaines de personnes assister le matin à la fabrication du fromage et l’après-midi à la traite des vaches.
Il semble bien loin le temps où le couple débarquait « avec des rêves de baba cool », route de la duchesse Isabeau d’Écosse. Après s’être rencontrés dans une entreprise d’événementiel à Paris, où ils travaillaient, Gurvan, originaire de Baden et Isabelle de Niort ont eu envie de revenir à l’essentiel. « On voulait bricoler du fromage avec une vache et une chèvre, on pensait que ça serait simple… »
Mais le retour à la terre n’a pas été aussi facile. Sur un territoire où la pression foncière est forte, il a fallu trouver dix-neuf hectares, minimum légal pour pouvoir s’installer, trouver les vaches… Et se former.
« On s’est pris au jeu. On a créé notre exploitation en 1999 avec deux vaches Pie noir », une race qu’ils ont contribuéà sortir de l’oubli. « Mais au bout de quatre ans, la banque ne nous suivait plus. On a fait venir des fromagers savoyards et auvergnats qui nous ont livré leurs secrets de fabrication. On a fait notre propre synthèse. »
Petit à petit, la tome de Rhuys s’est forgée un nom (protégé auprès de l’INPI) sur les marchés et dans la boutique de la ferme. « On n’a jamais répondu aux sirènes de la grande distribution. On ne veut pas brader notre savoir-faire. C’est à nous de fixer nos prix, pas aux grandes surfaces. »
Aujourd’hui, Gurvan est devenu une figure du Salon de l’agriculture de Paris où il se rend depuis onze ans. Le couple livre pas moins de 80 restaurants, brasseries, épiceries et fromageries dans l’Ouest.
Chaque année, 30 tonnes de tome de Rhuys sortent de la ferme de Suscinio, sans compter le beurre. Mais pas question de prendre la grosse tête. Le couple n’oublie pas les périodes de vaches maigres.
« Ce qu’on a, on ne l’a pas volé. On a vécu quinze ans dans un mobile-home sur l’exploitation. Nos enfants n’osaient pas inviter leurs copains à la maison. Aujourd’hui, on a 32 vaches et on exploite 49 ha de terre. Notre seule fierté : c’est d’être parvenus à prouver qu’on peut fabriquer du fromage de qualité en Bretagne. »